Un peu de repos

Cette journée avait été la moins éprouvante de toutes. Caellys commençait à s’habituer à la solitude et aux affres de la guerre. Soigner les autres était devenu ce qu’elle savait faire de mieux. Petit à petit, elle apprenait à se satisfaire de cette vie bien plus rude que celle qu’elle avait eu la chance de connaître avant.

Depuis quelques jours, elle s’occupait de soigner les soldats en poste à Verteron, où les attaques répétées des Kralls manquaient de faire vaciller la citadelle à tout instant. On commençait à la connaître. Soulager la douleur était devenu son lot quotidien. Bien entendu, les choses avaient été difficiles, au début. Comment supporter le sang et les cris lorsque l’on n’est qu’une fille de riches marchands, habituée à une vie confortable et facile ?
Mais elle s’était accrochée. Chaque fois qu’un doute s’insinuait dans son esprit, elle repensait au pèlerinage fait plusieurs semaines auparavant, quand le don d’Aion s’était révélé : ces souvenirs suffisaient à lui rappeler quel était son devoir. Peu à peu, elle s’était endurcie, sans vraiment s’en rendre compte. Oh, sa gentillesse naturelle et sa fraîche naïveté n’avaient pas encore disparu – ce qui n’était, au final, sans doute pas si mal – mais elle n’éprouvait plus de gêne face à la poussière et à la souffrance. Il lui était arrivé de se précipiter en pleine bataille pour soigner un blessé, chose pour laquelle on l’avait réprimandée, mais elle avait su que c’était ce qu’elle devait faire. Et, en définitive, elle lui avait sauvé la vie. N’était-ce pas la preuve que c’était bien ce qu’on attendait d’elle ?
À mesure que le temps passait, la jeune fille s’habituait donc à sa nouvelle vie. Elle n’était pas encore aussi solide que d’autres guérisseurs dont elle avait pu admirer le courage et le talent, mais cela viendrait.

Ce soir-là, on l’avait congédiée, avec l’ordre absolu de ne pas remettre les pieds dans la citadelle avant d’avoir pris un peu de repos. Bien que contrariée par cette obligation, Caellys avait fini par obtempérer. Spatalos n’avait pas un mauvais fond : s’il la renvoyait ainsi, ce n’était pas pour s’opposer à elle mais pour lui permettre de se reposer. Une personne fatiguée n’était pas bonne à grand chose sur le champ de bataille, et on comptait trop sur les guérisseurs pour se permettre d’en avoir un défaillant. Alors, obéissant à son ordre, elle avait quitté ses mailles pour enfiler une tenue plus confortable et avait quitté la citadelle. Elle avait choisi de regagner le village de Poéta. Ce serait sans doute bien plus facile de se reposer ici, loin de l’agitation du Sanctum... si toutefois elle parvenait à occulter l’idée que, tandis qu’elle se tournait les pouces, les soldats Élyséens continuaient leur lutte.
Elle poussa la porte de la taverne. Ben, un pêcheur rencontré près du lac, lui avait dit qu’elle pourrait trouver une chambre à louer ici. Ce n’était pas le grand luxe, certes, mais c’était ça ou dormir à la belle étoile – et malgré tous ses efforts, Caellys n’en était pas encore à ce stade. Une odeur âcre de bière, de brûlé et de nourriture l’assaillit, en même temps qu’une vive lumière et un brouhaha de cris et de rires. Caellys soupira pour se donner du courage. Eh bien, quoi ? Aurait-elle peur de quelques paysans et mercenaires de passage, alors même qu’elle était capable de se jeter au milieu d’une bataille pour sauver une vie ? Après quelques pas et un regard désespérément fixé sur le comptoir, la jeune fille atteignit celui-ci.

« Bonsoir, commença-t-elle, la voix mal assurée. Je voudrais une chambre pour cette nuit, s’il vous plaît. »

Kalten, bien que n'étant pas derrière le comptoir, avait remarqué l'entrée de la jeune femme. Il avait également ressenti une certaine tension. Sa façon de marcher, de regarder fixement le comptoir. Il s'approcha donc de l'étrangère et s'accouda près d'elle.
- Bien le bonsoir, ma Dame. L'aubergiste est actuellement en cuisine mais il ne va pas tarder. Si vous désirez une chambre, ce n'est pas ça qui manque.
Sans la regarder, il ajouta :
- Vous y trouverez tout le repos et le réconfort que vous pourriez chercher. En attendant, un verre de quelque chose vous ferait certainement plaisir ?
Voyant que la jeune femme ne semblait pas se détendre, Kalten alla de l'autre côté du comptoir.
- Je vous servirai moi-même. Sawyer, l'aubergiste, semble plus occupé que prévu.

« Chaud..chaud…chaud devant » criait Shairya en titubant tellement le plateau fumant qu’elle portait était trop lourd pour elle.

Depuis quelques temps maintenant elle était à la taverne de l’astre et elle s’amusait à apprendre sa nouvelle vie, et travailler ici lui plaisait, elle était curieuse de tout et voulait toujours tout savoir, posant d’innombrables questions, réalisant tout un tas de taches diverses et variées, se lançant des défis constamment. Et aujourd’hui c’était le service en salle, après d’âpres négociations entre elle Sawyer et Haven.

Elle avait donc prit sa première commande et elle apportait son premier plateau, qu’elle avait maladroitement bien trop remplit, et son équilibre en était évidemment déstabilisé. Les verres qui s’entrechoquaient, le pichet de vin qui manquait à tout instant de déborder sur le petit ramequin de sauces aux herbes, l’assiette de Quenelle chaude de Grande crête qui fleuretait dangereusement avec le bol de Soupe de Vénéra, qui manquait à tout moment d’asperger le Curry de Dado ;

Ses yeux dépassaient à peine de tout cette charge et elle avançait un peu à taton, quand elle sortit du couloir de la cuisine, et que Kalten fit le tour du comptoir, la percussion future et inévitable ne faisait aucun doute.....

Caellys n’avait guère d’expérience dans les us et coutumes de la campagne. Le peu qu’elle avait eu l’occasion de voir à Verteron lui avait appris que non, tous les hommes qui s’accoudaient au comptoir près d’elle n’avaient pas forcément envie de se montrer violents ou discourtois – du moins, la plupart du temps. Lorsque l’homme s’approcha d’elle, la jeune fille prit une profonde inspiration, soupira, déglutit et finalement osa lever les yeux vers lui.

« Je vous remercie, mais je ne souhaite pas boire, dit-elle, espérant que sa voix percerait malgré le bruit assourdissant de la salle. Je voudrais juste pouvoir me reposer. Et manger, si c’est possible. »

Durant un instant, elle s’imagina coincée entre deux paysans racontant comment ils avaient vaincu à mains nues un krall ou un loup féroce. Elle devrait probablement hocher la tête d’un air compréhensif en espérant qu’on ne la forcerait pas à donner son avis sur la question. Ah, pourquoi n’avait-elle pas pu rester à Verteron comme elle l’avait souhaité ? Certes, elle était fatiguée, mais elle était sans doute bien plus à l’aise là-bas, où on la connaissait, plutôt qu’ici. Tâchant tant bien que mal de dissimuler son appréhension, elle resta donc là, droite comme un i, dans l’attente d’un salut providentiel.
Au Sanctum, tout paraissait beaucoup plus simple. Il y avait sans doute bien plus de monde, mais chacun était plongé dans ses propres préoccupations et ne faisait guère attention aux autres. Et lorsque cela arrivait, il y avait toujours une certaine distance dans la voix et dans les gestes : personne ne se serait laisser aller à une quelconque marque de familiarité ou de sympathie. Caellys, qui avait toujours détesté ce comportement, se surprenait soudain à s’en souvenir avec mélancolie. Elle ne serait pour rien au monde retournée à sa vie d’avant, mais le fossé qu’il y avait entre son passé et son présent était si grand qu’elle redoutait de ne pouvoir le franchir aussi aisément. Et, une nouvelle fois, elle maudit intérieurement ses parents, leurs rêves de grandeur et leur stupide vanité qui l’avait conduite à avoir peur de tout.

Alors qu’elle tentait de recouvrer un semblant de calme – et surtout d’avoir l’air naturel – la jeune fille vit soudain apparaître un plateau, porté par on ne pouvait savoir qui, et comprit aussitôt ce qu’il allait arriver. Elle tendit les mains comme si ce geste pouvait avoir pour effet de suspendre le cours du temps et s’écria :

« Oh ! Attention, derrière vous ! »

En entendant la jeune femme s'écrier, Kalten se retourna juste à temps pour voir arriver sur lui une multitude de plats. Il prit dans le ventre le rebord du plateau et s'affala de tout son long. Tout en tombant, il vit les assiettes et les bols voler dans les airs. Un fracas énorme retentit dans la salle de l'auberge, ce qui fit taire touts les langues et se retourner tous les regards.

- Oh, non ! Qu'est ce que j'ai fait ?

Shairya put voir le carnage. Adieu quenelle, venera et dado.

Pas un bruit dans la salle. Tout le monde regardait le rôdeur par terre, les vêtements trempés et maculés. La jeune femme, elle, restait les bras tendus, trop étonnée par ce qu'il s'était passé. Quant à Shairya, elle ne savait plus où se mettre.

- Douce Dame Haven ne va pas être contente de moi.

Kalten, en entendant ces paroles, reprit ses esprits.

- Il faut que je répare ma faute. Il le faut.

C'est alors que Shairya vit la jeune femme. Voyant en elle une aînée, elle n'en rougit que plus.

Un éclat de rire retentit alors. Kalten riait à s'en décrocher la mâchoire. Ce qui n'arrangea pas l'état de Shairya. Kalten se releva, riant encore tout en essuyant le curry de dado qui ornait désormais sa tunique. Il passa une mains dans les cheveux de la jeune fille pour les ébouriffer.

- Ce n'est pas grave, Shairya.

Le rôdeur riait encore.

- Voici ce que je te propose. Tu vas tout de suite avertir Sawyer qu'il doit préparer à nouveau les plats. Puis tu viendras m'aider à nettoyer tout ça. Et ne t'inquiète pas pour Haven, elle ne t'en voudra pas.

Kalten s'acroupit à côté de la jeune fille.

- Et je vais te préparer quelques exercices pour muscler un peu ton corps ainsi que pour développer tes réflexes. On commencera demain.

Se relevant, il se tourna vers la nouvelle arrivée.

- Désolé du contetemps, ma Dame.

« Vrai ? » lui demanda t elle « ho par tous les Saints de Siel Merci Homme Cerf Kalten… » Elle tapa dans ses mains.

Elle sourit et prit un air sérieux, saluant Kalten de sa révérence mis martiale mis gracieuse « Maitre, je suivrais vos enseignements avec application, à l’heure où blanchit la campagne, je serais prête » dit elle très cérémonieusement.

Tel un ouragan des plages de l’Observatoire au printemps, Shairya couru en cuisine en criant

« Homme Auberge Saywer, j’ai tout fait tomber je suis désolée…il faut tout refaire…je suis vraiment désolée ….je vous promets de ne pas recommencer.. je suis…» sa voix s’éteignit dans le couloir pour réapparaitre à peine une minute plus tard

« Homme Cerf Kalten j’arrive…ne bougez pas »

Shairya débordait d’énergie ce soir, et elle courrait dans tous les sens, de la cuisine au débarras afin de trouver de quoi nettoyer, le sol et Kalten. Enfin arrivée à la hauteur de l’homme qui s’était relevé et parlait à la belle étrangère, Shairya se stoppa net, gardant la bouche ouverte à gober les mouches, ne sachant pas quoi faire, puisqu’au départ elle voulait nettoyer la belle armure de cuir, mais se faisant elle aurait du déranger la dame.

Elle regarda tour à tour Kalten, Caellys, le sol et ses pieds…

« hum…tenez » dit elle en lui tendant un chiffon de lumesia « pour votre visage »

Elle réfléchit un instant et reprit en posant au sol son barda de nettoyage.

« Vous devriez ôter votre armure, je la nettoierais plus tard » lui dit elle devant lui les bras tendu, en attendant qu’il se déshabille. Oubliant totalement les enseignements de Haven sur la pudeur et la nudité ici.

Si elle était censée se reposer, les choses commençaient plutôt mal. Ce n’était pas au milieu du brouhaha et du curry de dado qu’elle pourrait retrouver un peu de calme... Caellys se dandina d’un pied sur l’autre. Qu’était-elle censée faire, au milieu de tout ce bazar ? Rassurer la jeune fille ? Non, l’homme s’en était chargé pour elle. Aider à nettoyer ? Ce n’était pas ce qu’on demandait aux clients... Alors, que faire ? Attendre qu’on veuille bien lui servir à manger et lui donner une chambre semblait être la meilleure solution. Parmi toute cette agitation, elle devait rester calme et patienter – ce qui, étant donné la nature de Caellys, n’était pas si compliqué que cela.
Elle croisa les mains sur sa ceinture, juste pour pouvoir se triturer les doigts à loisir. Elle ne demandait pourtant pas la lune... C’était un peu comme la fois où elle avait dû aller à la bibliothèque, et où elle avait trouvé les responsables pris dans une longue conversation pour savoir s’il valait mieux classer les ouvrages par ordre alphabétique ou par thème. Bien que le sujet fût sans nul doute passionnant, Caellys s’était retrouvée à attendre qu’on veuille bien s’occuper d’elle, n’osant pas interrompre la discussion. C’était la même chose ici. Tandis que l’homme et la jeune fille constataient le désastre qu’ils venaient de faire, la guérisseuse, elle, patientait, avec la désagréable sensation de ne pas être à sa place.

« Je vous en prie », dit-elle rapidement quand l’homme se tourna vers elle.

Visiblement, il n’était pas le propriétaire de l’endroit. Peut-être valait-il mieux attendre que l’aubergiste vienne lui-même pour lui donner la chambre qu’elle demandait. De sa manche, elle essuya les gouttes de soupe qui avait éclaboussé ses vêtements, puis releva les yeux vers la scène qui se déroulait sous ses yeux. Elle aurait aimé se trouver à des lieues de cet endroit. Et quelque chose lui disait qu’elle n’était pas au bout de ses peines...

Déjà il avait entendu le fracas dans la salle. Puis, bouche bée, assister au retour en cuisine de Shairya, maculée de nourriture, un brin paniquée. Décidément, il devait voir ca !! Il arriva dans la salle pour constater le capharnaüm.

Déjà le sol qu’il allait falloir nettoyer rapidement avant que d’autres personnes ne tombent.
Puis Shairya qui voulait, le plus naturellement du monde, que Kalten se déshabille là devant tous le monde.
Enfin il vit la femme au comptoir. Et Kalten qui semblait un eu occupé avec Shairya …

Alors il s’approcha rapidement, interpella gentiment Shairya.

« Shairya, le sol d’abord, il faut tout ramasser et tout nettoyer pour que personne ne glisse et ne se blesse, le Cuir de l’ « Homme Cerf Kalten » peut attendre ».

Il avait esquissé un sourire en prononçant ces mots. Mais il n’avait quand même pas osé rire franchement, il y avait un peu trop de clients pour çà. Et puis il fallait s’occuper de la femme.
Il passa donc derrière le comptoir, frôlant Kalten en faisant bien attention de ne pas le toucher pour ne pas se salir … Machinalement il attrapa une choppe et un chiffon, et commença à la frotter. Puis il s’adressa à la femme.

« Bienv'nue à la Taverne de l’Astre M’dame, fait’pas attention au désordre, qu’est ce que je peux pour la p’tit dame ? ? A boire ? A manger ? Autre chose ? Demandez et vous serez servie ».

Se rappelant l’avoir vu faire tant de fois, et constatant à chaque fois la satisfaction des clients, il décida de tenter le coup, et se fendit d’un sourire, un peu coincé, mais chaleureux et sincère.

Shairya blêmit en voyant Saywer sortir de sa cuisine, mais fut rassurée de ne pas le voir en colère et au contraire, de prendre en main la situation. Elle hocha la tête à son instruction, et aussi vive que l’eau des rivières des montagnes, la voilà qui ramassait tout le fatras, essuyait le sol vigoureusement à l’aide d’un chiffon.

L’affaire était terminée, le sol avait reprit sa couleur d’origine, les bris de vaisselles tous dans un bac en bois, les restes de nourriture sauvés dans une écuelle à part et une Shairya, souriante maculée de nourriture des genoux à la pointe des cheveux.

« Maitre Cerf Kalten, voudriez vous m’aider je vous prie à soulever ceci, je crois que si je tente, je vais encore faire une grosse bêtise » dit elle à Kalten en désignant le bac en bois.

Elle regarda la dame au comptoir, en se frottant l’arrière du crane, tirant légèrement la langue et clignant un œil, le regard espiègle.

Amusé par l'attitude de la jeune fille, Kalten fit un clin d'oeil à Sawyer.

- Sawyer va s'occuper de vous, ma Dame, dit-il en s'adressant à l'étrangère. il semblerait que je sois pris par d'autres obligations.

Avec un petit sourire, le rôdeur prit docilement le bac que lui désignait Shairya.

- Et où dois-je l'emmener, ma Dame ? lui répondit-il.

Shairya sourit.

Elle gonfla le torse et prit un air de grande personne, enfin essaya t elle du moins

"suivez moi...je vais vous montrer mon brave"

N'y tenant plus, elle eclata de son rire d'adolescente, la tension était partie et les nerfs devaient lacher.

Caellys avait l’horrible sensation d’être au milieu d’une pièce de théâtre et d’avoir oublié tout son texte. Elle ne savait plus vraiment si elle devait parler, ordonner, se cacher ou tout simplement s’en aller. Durant une seconde – une toute petite fraction de seconde – elle regretta d’avoir choisi de venir à Poéta plutôt que de rentrer chez elle, au Sanctum. Après tout, ses parents n’étaient sûrement pas à la maison. Ils devaient être à sa recherche, inquiets qu’ils étaient... Ah, que n’avait-elle choisi le confort douillet de leur maison douce et accueillante !
Elle adressa un sourire crispé à la jeune fille, puis à l’homme. Essayant d’ignorer la scène qui se déroulait non loin d’elle, elle reporta son regard sur le propriétaire de l’établissement et se râcla la gorge.

« Hum... J’aimerais une chambre pour cette nuit, s’il vous plait. Et un repas. »

Un nouveau coup d’oeil sur sa droite lui apprit que l’homme avait décidé de suivre la jeune fille, chose qui était sans doute la meilleure solution. Caellys poussa un soupir de soulagement. Allez. Ce n’était pas le moment de craindre son ombre. Elle avait grandi dans une grande ville, et pas la moindre : le Sanctum. Elle avait su se frayer un chemin parmi des templiers et des mercenaires, sans avoir la moindre crainte. Mais tout était si différent, ici. Les gens semblaient si... vivants !
Elle passa rapidement sa main sur un tabouret pour en ôter une saleté qu’elle imaginait sûrement et s’assit face au tenancier. Son cœur s’était presque calmé, à présent. Prenant un air qui se voulait assuré – mais qui ne l’était en réalité pas du tout – la jeune fille fit semblant d’être à son aise.

« C’est animé, ici. Vous avez du monde. »

Sawyer était tavernier depuis bientôt 25 longues années. Bien avant que le vieux Will ne lui cède son auberge à sa mort. Il y travaillait déjà enfant. Ayant tout appris ou presque sur place. Alors quand il prend enfin le temps de détailler un peu cette femme qui se tenait devant le comptoir. Qu’il remarque le ton qu’elle emploi et sa gestuelle, il ne s’y trompe pas. C’est surement une dame du monde, comme on dit. Mais bon sang quel drôle d’endroit pour une personne pareille.

Finalement, c’est la curiosité qui le pousse à continuer. Pas une curiosité malsaine et pleine de sous entendus, non. La simple curiosité de savoir pourquoi une femme de cette classe, si on peu dire, venait honorer son auberge. Et puis aussi … Peut être en savoir plus sur ses intentions. Qui sait, il faut toujours être sur le qui vive !!

Après avoir jeté un rapide coup d’œil sur la salle presque bondée à cette heure, il se rend compte qu’il sera intenable pour la belle de manger au milieu des paysans. Non pas qu’il eu quelque chose contre, au contraire, mais la belle n’apprécierait surement pas.

« Oui c’est souvent. Ils aiment no’t cuisine vous savez » dit ‘il avec un brin de fierté.

« Pour manger j’vous conseil d’rester au bar. C’est pas très confortable, mais personne viendra vous embêter ici. »
« Et puis vous éviterez les renversement de plateaux !! » Ajouta-t-il en riant.

« Pour la chamb, j’vais prévenir Haven qu’elle vous prépare çà. Vous verrez, la nuit c’est calme ici, et nos chambres sont soignées. Vous y serez bien. »

« En attendant si un des ces hommes approche, lancez lui juste un regard provocateur, avec vo’t prestance, ils n’os’rons pas s’approcher. Mais bon, ici vous risquez rien d’toute façon ».

« Ca ira ma p’tit dame ? »

Un regard "provocateur" ? Caellys resta interdite une seconde ou deux. Qu'est-ce que cela voulait dire ? Elle avait du mal à s'imaginer lançant un sourire et un clin d'oeil à l'un de ces hommes, non pas parce qu'ils n'étaient pas de son rang, mais parce qu'elle aurait eu bien trop honte de le faire. Dans l'absolu, repousser les avances de quelqu'un n'était pas bien difficile : elle avait déjà eu à le faire – et à plusieurs reprises avec le même homme, d'ailleurs. Non, en réalité, c'était surtout le fait d'être dans un environnement qu'elle ne connaissait pas qui la mettait si mal à l'aise. Au comptoir, les choses semblaient plus simples. Elle n'avait pas besoin de se mêler aux autres et de se retrouver une nouvelle fois au milieu d'une conversation qu'elle ne comprendrait pas.
Enfin, le tavernier semblait normal, lui. Ou plutôt, il n’avait pas l’air bizarre, ce qui tendait à rassurer Caellys. Elle n’aurait sans doute pas eu le courage de dormir dans cet endroit si son tenancier avait été un vieux fou aux regards lubriques et sous-entendus à peine voilés. S'autorisant un sourire, elle hocha la tête :

« Ça ira, merci. Je suis étonnée que vous ayez autant de personnel à votre service : je pensais qu’une petite taverne de campagne... »

Elle se mordit la lèvre et s’invectiva mentalement un millier de fois. Ah, bravo ! Ça, c’était bien joué. Le dénommé Sawyer allait sans aucun doute prendre la mouche, après une telle insulte. Ne jamais critiquer un commerce, répétait souvent sa mère. Il paraissait que c’était la règle absolue. Caresser le propriétaire dans le sens du poil était le meilleur moyen pour avoir des prix défiant toute concurrence. N’avait-elle donc rien appris de ces années passées à aider ses parents ? Quelle idiote !

« Veuillez m’excuser. Je ne voulais pas dire ça... C’est juste que... »

Et plus elle tentait de s’expliquer, plus elle s’enfonçait. Avec un gémissement confus, elle se mordit la lèvre, seul moyen de se taire une bonne fois pour toutes et d’enrayer le flots d’inepties qu’elle s’apprêtait à dire.

« Que c’est une petite taverne de campagne oui »

Repris Sawyer sur le ton de l’affirmation en hochant la tête, semble t’il pas irriter le moins du monde.

« C’bien pour ca qu’nous avons autant de succès, la plupart des gens ici viennent pour l’ambiance, et la nourriture ! »
« Par contre … vous méprenez pas … les gens qu’ vous avez vus sont pas des employés. Mais se s’rait un peu compliqué à expliquer »

Alors qu’il commençait déjà à tourner les talons, il continua un peu plus fort.

« J’vous envoi Shairya pour la commande et j’ fais préparer vot’ chamb ».

Arrivé presque dans l’arrière cuisine il héla la jeune femme.

« Shairya tu prend’ la commande de la dame steplait ? »

Puis disparu derrière la porte.

Sa deuxième commande, elle allait donc prendre sa deuxième commande, elle était ravie. Elle couru donc se nettoyer en vitesse, et avisa un tablier blanc qui était accroché à une patère depuis longtemps, vestige de la présence d’un ancien cuisiner. Bien sur le dit tablier était bien trop grand pour elle, mais cela irait très bien pour l’office qu’elle lui demandait, cacher les traces qu’elle n’avait pu faire partir de la catastrophe précédente.

Elle prit son crayon de bois, et son carnet de feuille de sobi et retourna dans la grande salle, son sourire radieux sur le visage. Elle avait apprit sa leçon par cœur et elle était prete à prendre la commande de la dame.

Ho bien sur elle était intimidée, car la dame était belle et étrange, son regard n’avait pas la douceur de celui de la douce dame haven, il n’avait pas non plus la dureté de celui d’Ishaira, elle lui faisait pensé à Ishanaelle, dans ses bons jours…Shairya soupira, c’était loin tout cela maintenant…

Elle en avait tant appris en ces dernières semaines, elle était heureuse de sa nouvelle vie, les gens ici étaient gentils, bien qu’un peu étranges de temps en temps.

Perdue dans ses pensés, elle ne se rendit pas compte qu’elle était arrivée à destination depuis presqu’une minute maintenant. Elle leva le nez et sourit à la Dame.

« Bonjour Belle Dame voyageuse, soyez la bienvenue dans la Taverne de l’Astre » récita t elle de sa voix fluette « aujourd’hui pour ravir vos papilles nous vous proposons le plat du jour un pleuro épicé, péché du jour, accompagné de son curry de Wiki, nous pouvons vous servir de l’eau de source, ou du vin à l’umblia en pichet sauf si vous préférez la douceur d’un cocktail » elle sourit.

Prête à prendre la commande, Shairya était fière d’elle, pour une fois elle n’avait pas mélanger les plat, comme lors de sa première commande.

Caellys avait recommencé à respirer normalement dès lors que Sawyer avait terminé la phrase qu’elle n’avait pas osé dire. À présent, la perspective de prendre un bon dîner avant une bonne nuit de sommeil la rassérénait plus encore. Ce fut donc avec un sourire plus détendu qu’elle accueillit la serveuse, charmante jeune fille blonde aux pommettes colorées. Le plat proposé était, à l’oreille, tout à fait au goût de Caellys, qui hocha la tête en entendant la serveuse le lui annoncer.

« Un plat du jour, ce sera très bien. Et, hum, de l’eau, s’il vous plaît. »

Elle patienta, tendant l’oreille sans trop le vouloir, captant des bribes de conversation pas toujours des plus fines. La campagne avait quelque chose de simple – mais pas forcément plus rassurant – que la ville n’avait pas. Elle parviendrait sans doute à trouver le sommeil et profiterait d’un repos bien mérité. Néanmoins, la perspective d’abandonner le front n’était toujours pas pour lui plaire : elle avait la désagréable sensation de manquer quelque chose, de ne pas être au bon endroit. À cet instant, il y avait peut-être quelqu’un qui avait besoin d’elle. Comment accepter de rester inactive, dans ces conditions ? Comment ses parents avaient-ils pu croire qu’elle deviendrait commerçante plutôt que d’utiliser son Don pour la bonne cause. Et l’épouser, lui. Rien qu’à cette pensée, elle en avait la nausée.
Perdue dans ses pensées, elle attendit qu’on la serve, sans se rendre compte que ses paupières chargées par la fatigue accumulée se fermaient peu à peu. Oh, s’endormir à table ne se faisait pas, non. Éveillée, Caellys en aurait probablement été outrée. Mais elle n’était pas vraiment à table. Elle n’avait pas encore l’assiette sous le nez – heureusement. Elle ne s’en rendait même pas compte, d’ailleurs. Et puis somnoler cinq minutes en attendant n’a jamais fait de mal à personne, n’est-ce pas ?

« Il vaudrait mieux retourner là-bas », marmonna-t-elle, les yeux clos.

Oui, sûrement. Mais elle avait bien besoin de repos.

Shairya nota sur son calepin la commande de la belle dame au comptoir et couru en cuisine pour annoncer le plat qu'il fallait lui préparer.

Elle partit ensuite prendre un pichet, le remplit d'une eau fraiche et pure et l'apporta au comptoir en déposant un verre en grés à coté. Se faisant elle s'était hissée sur un petit tabouret, afin d'être à la bonne hauteur.

Elle mit ensuite ses deux coudes sur le comptoir, et prit son menton entre les mains, pour observer la salle à manger. Elle trouvait très bien qu'Aion lui ai fait découvrir cette taverne de l'Astre, elle avait beaucoup apprit sur le monde extérieur rien qu'en observant les gens manger..

Un murmure attira son attention alors qu'elle était en pleine réflexion sur l'observation d'un couple de chasseur en train de converser sur la manière dont un rinox devait être capturé. Elle tourna la tête et vit la belle dame, les yeux fermés parlé toute seule. Alors sans malice aucune, juste par une simple curiosité de jeune fille, elle observa les traits du visage de cette belle dame.

Elle semblait fatiguée, mais pas une fatigue comme les paysans qui viennent boire un coup le soir après une dure journée de labeur, d'ailleurs quand on observait ses mains on se rendait vite compte qu'elle n'était pas une paysanne à laver son linge dans les lavoirs de village encore moins à travailler la terre. Elle portait une robe très belle, comme celle que se confectionnait la gracieuse et sophistiquée Ishanaelle, avec moins de fanfreluches cela dit. Sa coiffure était travaillée, mettant en valeur son beau visage. Aucun doute pour la petite shairya, cette demoiselle devait être une élue d’Aion, d’ailleurs à qui pouvait elle bien parler si ce n’était pas à Aion lui-même ?

Son observation allait bientôt être interrompue brutalement par les appels de Sawer qui prévenait que le plat du jour était chaud et qu’il fallait le servir. Brutalement, oui, car la voix de l’homme en cuisine la sortie de ses pensées si brutalement qu’elle tomba à la renverse, cherchant à se récupérer, et ne pu qu’attraper le pichet d’eau. Ce dernier non seulement ne fut pas une prise assez sérieuse pour la maintenir, mais fut l’origine d’une belle coupure à la main, alors que la gentille Shairya se retrouvait de nouveau les quatre fers en l’air, devant une Caellys éberluée.

« Shairya ! Le plat du jour est prêt ! Tu peux le servir !»

Sa main saignait abondamment, ses yeux commençaient à s’embuer de larmes, mais se mordant le coin de la lèvre, elle ne pleura pas. Cherchant du regard, tout d’abord Elyssandre qui bien sur ne pouvait être là, réminiscence de son ancienne vie, puis l’instant d’après Haven qui veillait sur elle en toute circonstance, mais par on ne sait quelle affaire, avait été vraisemblablement retenue ailleurs.

Non, Caellys ne parlait pas à Aion, mais bel et bien à elle-même, au fond d'une nuée sombre et salvatrice que promettait le sommeil à venir. Sommeil qui fut de courte durée, car à peine commençait-elle à ne plus entendre le brouhaha de la salle qu'un raffut terrible parvint à ses oreilles, quelque part entre l'apocalypse et le raz-de-marée. Caellys manqua d'en choir de son tabouret. Se redressant vivement, l'air de dire « Non, je ne dormais pas », elle chercha l'origine du bruit de verre brisé et de chute qui venait de la réveiller si brusquement. Son regard fut attiré de l'autre côté du comptoir, où la jeune serveuse venait de tomber, la main en sang et les larmes aux yeux.
Caellys ne chercha pas à comprendre ce qu’il venait de se passer – c’eut été admettre qu’elle dormait, ce qui ne se faisait pas en public, et donc qu’elle n’avait pu avoir l’audace de faire, n’est-ce pas ? Contournant le comptoir, elle s’agenouilla près de la jeune fille et saisit sa main dans les siennes.

« Je vous en prie, laissez-moi faire. »

Utiliser le don d’Aion était toujours quelque chose d’un peu effrayant et de terriblement excitant. Sentir la douce chaleur l’envahir et passer dans l’autre corps, voir la lumière entourer ses mains, envelopper les blessures les plus terribles et les guérir, comme si elles n’avaient jamais existé... Son cœur battait toujours aussi fort lorsqu’elle voyait le miracle s’accomplir. Y avait-il plus belle chose que de sauver la vie de quelqu’un ? Certes, soigner une main blessée ne s’apparentait pas au sauvetage d’une vie, mais c’était tout aussi gratifiant.
Rapidement, la plaie sur la main de Shairya se referma, et à l’exception du sang qui tâchait désormais sa peau, rien n’aurait pu laisser croire que la jeune fille s’était blessée quelques secondes auparavant. Il ne subsistait jamais de cicatrice.
Avec un sourire, Caellys murmura un remerciement, comme elle le faisait toujours. Remercier pour ce don qu’elle avait était la moindre des choses. Sauver des vies, soigner la douleur, ça n’avait pas de prix. Ses parents ne pourraient jamais comprendre. Lui non plus, sans doute. C’était pour cela qu’elle avait quitté le Sanctum. Là, au moins, elle était utile.
Elle attrapa un torchon et entreprit de nettoyer le sang qui restait sur la main de Shairya, et, tandis qu’elle essuyait doucement, elle annonça avec un sourire gentil :

« Voilà qui est mieux, n’est-ce pas ? »

Alertée par le bruit de la chute, la clerc se débarrassa le plus vite possible des paquets qui lui encombraient les bras. Sorti de la réserve au plus vite et pressait le pas vers le comptoir, semble t’il l’origine du bruit. Elle se déplaça prestement mais sans bruit. Elle savait depuis longtemps que crier, et ainsi ajouter des cris aux cris, n’était jamais aller dans le bon sens, mais ne servait souvent qu’à effrayer ceux qui ne l’étaient pas encore.

C’est ainsi qu’elle arriva non loin des deux jeune femmes, au moment même où une inconnue, baissée sur Shairya, lui administrait visiblement des soins. Elle resta là, a quelques mètres, le temps de la manœuvre. Puis quand l’inconnue se mit à nettoyer le sang de la plaie, elle fini de s’approcher en souriant.

« Un don oh combien précieux que AION vous a donné, vous avez de la chance. »
« La chambre que je dois préparer est pour vous je crois, je m’en occupe dès que j’ais fini mon rangement. »
« Oh et … vous serez notre invitée n’est ce pas. Pour vous remercier de vous être occupée de Shairya. Je vais faire vite. »

Avant que les deux jeunes femmes ne puissent répondre, Haven se dirigeait déjà de nouveau vers la réserve, pour y finir son rangement. Rassurée.

Un peu honteuse de s'etre une fois encore ridiculisée dans la salle a manger, Shairya resta assise par terre, se laissant faire, laissant la belle étrangère s'occuper de sa plaie. Quand Haven arriva elle fut encore plus embetée, mais comme toujours Haven ne cria pas, observait en silence et repartit de son pas calme. Sa silhouette disparue dans les escaliers avant qu'elle ne puisse dire quoi que se soit, se retrouvant devant la Dame.

Rien ni personne n'avait réussit à empecher Shairya d'appeler les dames Daeva ....des Dames, aussi s'adressa t elle à Caellys, comme elle s'adressait à Haven, lui trouvant a elle aussi son surnom.

"Qu'Aion soit remercié de vous avoir mise sur ma route Dame aux Murmures-Tristes" lui dit elle en se relevant "Douce Dame Haven à raison, votre don est précieux" ajouta t elle en souriant tristement.

De nature joyeuse, et optimiste shairya chassa les tristes pensées qui venaient de s'imposer à son esprit et fit une mignonette révèrence à Caellys.

"Je m'appelle Shairya, et c'est un plaisir de faire votre connaissance Dame Aux Murmures-Tristes, je vous apporte votre commande au plus vite, vous semblez lasse et un savoureux repas vous fera du bien"

Elle lui souriait, de son sourire charmant et naif, ses yeux verts plantés dans les siens, effrontement auraient pu pensé les gens de la haute societé Sanctumoise, mais si naturellement pour la jeune amazone.

Dame aux Murmures Tristes ? Le surnom, dans la bouche de Shairya, parut étrange aux oreilles de Caellys. Elle ne se considérait pas comme quelqu’un de triste, d’ordinaire. Était-ce vraiment ce qu’elle laissait paraître ? Après tout, ce n’était peut-être pas si surprenant. Toute sa vie avait changé en peu de temps, et elle avait traversé beaucoup de choses qui, pour elle, étaient de véritables épreuves. Mais... elle n’était pas triste, non. Au contraire, elle s’estimait plutôt chanceuse... donc heureuse.
Elle se releva à son tour et s’inclina légèrement devant la jeune fille, la gratifiant de son plus beau sourire comme pour lui prouver qu’elle ne méritait pas ce surnom.

« Je m’appelle Caellys, dit-elle avec candeur. Caellys Tehrun. Je suis ravie d’avoir pu vous aider. »

Finalement, elle était plutôt contente d’avoir fait une halte dans cette auberge. Elle ne s’attendait certes pas à user de son don pour soigner une plaie causée par un pichet d’eau, ni à s’endormir en pleine salle – ce qu’elle aurait cru impossible vu le bruit qui régnait dans la taverne – et encore moins à se sentir presque en sécurité dans cet endroit. Elle finirait sans doute par passer une bonne soirée, et une bonne nuit.
Reprenant place sur son tabouret, elle frotta ses yeux ensommeillés et posa son menton dans ses mains, les coudes appuyés sur le comptoir. Une femme était passée, tout à l’heure. De nouveau, Caellys s’interrogea. Pourquoi une si petite taverne de campagne avait-elle tant de main d'œuvre ? Il y avait du monde, certes, mais pourtant, Sawyer avait dit qu’ils ne travaillaient pas pour lui.

« Excusez-moi, Shairya... Le tavernier m’a dit que vous n’étiez pas une employée, ni les autres, d’ailleurs. Comment se fait-il que vous l’aidiez, dans ce cas ? Vous avez une dette envers lui ou quelque chose ? »

Elle réfléchit à ses paroles, et après quelques secondes, ses joues se teintèrent de rouge.

« Je suis très indiscrète, excusez-moi ! »

Indiscrète, sans doute. Curieuse, certainement. Et il était trop tard pour changer son caractère.

Shairya allait repartir, une fois encore, en cuisine afin de lui apporter son repas quand sa dernière question la ramena au comptoir.

Tout d'abord perplexe, elle qui n'avait pas encore trop compris ces histoires de kinah, de travail rémunéré et tout ...ne su pas quoi lui répondre, mais la toute dernière reflexion la fit rire aux eclats.

"ho ...la curiosité est une preuve d'intelligence vous savez..c'est ce que dit toujours la sage Seliandra"

Puis se frottant le menton, elle souhait tout de même répondre à la question posée, alors la vérité toute simple s'imposa.

"Nous sommes amis, tout simplement Dame aux murmures tristes. Douce Dame Haven habite ici et s'occupe de la propreté et du ravitaillement, l'homme Cerf Kalten s'occupe de la chasse et des rondes de garde, l’homme Titane Falkhen ..heu..." elle s'interrompit...ne sachant pas vraiment quoi dire sur cet homme qu'elle n'avait vu qu'une ou deux fois "heu..quant à lui ...je ne sais pas...mais quand il n'est pas ailleurs il est ici"

Elle sourit.

"C'est la volonté d'Aion que de rassembler ses enfants vous savez. Quant à moi...et bien...je tente d'aider au mieux de mes possibilités " dit elle en haussant les épaules et en regardant en direction de la catastrophe au plateau.

La clerc redescend de l’étage où elle venait de finir de préparer la chambre pour la nouvelle invitée. Elle se dirige vers les deux jeunes femmes et entends juste la fin de leur conversation. Toujours avec son visage souriant qui semblait inébranlable, et sa voix douce et chaleureuse, elle se permit d’intervenir.

« Nous aidons Sawyer en échange du couvert et du gîte. Cette auberge est un peu nôtre maison. »
Puis sautant du coq à l'âne.
« Votre chambre est prête, c’est la deuxième à gauche en haut de l’escalier, elle vous attend »

Puis elle semble un peu gênée, et ajoute de suite.

« Pardonnez moi pour tout à l’heure, je ne me suis pas présentée, je suis Haven, et je vois que vous connaissez déjà Shairya ».